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La majorité des grandes plateformes de trading d’actifs numériques offrent maintenant des cartes bancaires qui permettent de payer des biens et des services à partir des fonds disponibles au sein des portefeuilles.

Une grande question ici est de savoir si ces cartes peuvent représenter un véritable intérêt en tant qu’utilisateur. Au-delà des considérations des avantages en nature, des frais minimaux (ou inexistants), des cash-backs et autres, il convient d’analyser la nature juridique de l’opération derrière le paiement par le biais d’une carte crypto.

Plusieurs modes de fonctionnement

Il faut distinguer deux modes de fonctionnement dans ce cadre : dans le premier cas, la carte crypto est approvisionnée avec de la monnaie fiat et elle peut être utilisée sans difficulté, et dans le second cas, les actifs numériques de l’utilisateur sont utilisés afin de réaliser la transaction.

Le premier mode de fonctionnement n’entraîne pas de difficulté particulière, c’est donc sur le second mode que nous souhaiterions nous attarder afin d’avertir des utilisateurs potentiellement tentés par ces innovations.

Un paiement grâce à une conversion en monnaie fiat

Dans le cadre d’un paiement par le biais d’une carte crypto, l’utilisateur ne paie pas véritablement avec des actifs numériques directement. Ce qu’il se passe en réalité est une conversion d’une partie des actifs numériques de l’utilisateur par la plateforme en monnaie fiat afin de réaliser le paiement.

Les utilisateurs de crypto-actifs les plus chevronnés reconnaîtront alors immédiatement la problématique avec l’opération ainsi décrite : la présence d’un fait générateur d’imposition.

Une lourdeur déclarative

L’article 150 VH Bis dispose ainsi que les plus-values sont réalisées par des personnes physiques lors d’une cession à titre onéreux d’actifs numériques. Chaque transaction entraîne donc les obligations déclaratives relatives aux plus-values et l’imposition de ces dernières.

C’est-à-dire que pour chaque transaction il faut noter la valeur totale du bag, le prix d’acquisition des actifs numériques concernés par la conversion, et le prix de cession des actifs au moment de la transaction. Tous ces éléments vous permettront de remplir le formulaire 2042-C et de calculer votre plus ou moins-value globale sur l’année lors de votre déclaration de revenus.

Cette lourdeur déclarative et fiscale a été récemment dénoncée par le député Pierre Person qui a proposé des solutions à ce problème dans une série d’amendements. Au sein de ceux-ci, Pierre Person propose la mise en place d’une exonération d’imposition en cas d’achat de bien ou de service dans la limite d’un certain seuil. Ainsi, les utilisateurs pourraient procéder à leur achat du quotidien sans être alourdi par les obligations déclaratives.

Notre avis ? Attendre

En l’état, rien ne permet à l’utilisateur d’une carte crypto de s’affranchir des obligations déclaratives et du paiement de l’imposition sur la plus-value.

Il convient de rappeler que les moins-values en matière d’actifs numériques ne peuvent pas être reportées d’une année sur l’autre, et que par conséquent un paiement au mauvais moment pourrait générer une perte inutilisable.

Au vu de ces éléments, notre conseil serait d’attendre une simplification et clarification du cadre fiscal avant de s’habituer à l’utilisation de ces nouveaux moyens de paiement.

Matthieu Lafont
Avocat à la Cour
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Vincent Fix
Etudiant au sein du M2 Fiscalité Appliquée, Université Paris-Est-Créteil